Marquèze sous les bombes
Un airial (éyriau en gascon) est une aire en campagne landaise, faite de pelouse plantée de chênes pédonculés et de pins parasols, où vivaient autrefois des familles de paysans (maître, métayer, résinier, berger qui, perché sur des échasses, surveillait le troupeau de moutons). La sylviculture intensive et industrielle de pins maritimes a progressivement fait disparaître la communauté agropastorale. Les airials ont été, petit à petit, abandonnés.
Sensibilisé par la qualité de l’environnement et de l’architecture des maisons landaises (bois et torchis) et par la fragilité de ce patrimoine, le Parc Naturel Régional des Landes de Gascogne a sanctuarisé l’airial de Marquèze ouvrant ainsi au public un écomusée où je fus guide dans ma jeunesse.
Marquèze sous les bombes
C’est un milieu sensible en ma terre natale,
Un refuge où la paix règne depuis longtemps.
L’airial1, antiquité des écomilitants,
Exhale sous les pins une aurore vitale.
Le crépuscule rouge où meurt l’âme fœtale
Et les murs du décombre où grondent les instants
D’un silence absolu n’ayant plus d’arcs-boutants
Sont les terreurs de l’homme et son arme fatale.
Les cris, les hurlements, dans le désert d’Orient
Assourdissent les pleurs qui plongent en priant
Les enfants aveuglés dans les feux d’un autre âge.
Je déserte et m’enfuis au rythme de l’humeur
Qui s’envole en douceur pour le dernier voyage.
Marquèze2, ô mon amour, fais-moi place en ton cœur.
1Lieu de vie dans les Landes
Je reconnais bien en ces mots de poète l'amour inconditionnel des milieux naturels qu'il est si important de protéger. Un poème touchant brodé de réminiscences du passé, des craintes de l'avenir, pour évoquer cette belle région des Landes riche de traditions et Marquèze, site admirable qu'il m'a plu de visiter par deux fois. La nature est belle dans sa sérénité mais sa paix bien fragile au regard des destructions induites par la main de l'Homme.
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RépondreSupprimerAirial : « Il permet jusqu'au début du XXe siècle de faire vivre plusieurs familles sur une seule aire de vie », lis-je dans wiki et ce que j’en retiens c’est que la paix est possible sur une même terre entre plusieurs familles, elle nait même de la vie en commun. Voilà une analogie tout à fait convaincante et prétexte pour le poète à s’expatrier en pensée vers des terres d’Orient , des bandes de terres convoitées, disputées, arrachées, et le massacre d’autres familles, d’autres communautés. À quoi alors se raccrocher sans « plus d’arcs-boutant » ?
Le parallèle « Âme fœtale » / « arme fatale » : clé de voûte de de ce voyage vers l’Orient c’est à dire l’Aube, la Naissance. C’est par un tour de passe-passe poétique que la violence et la mort (le crépuscule, donc) s’y donnent rendez-vous, et par un autre tour de passe-passe que le locuteur revient en sa « terre natale », à l’Ouest. Drôle de paradoxe.
Arf, j’ai du mal à exprimer ce que je ressens mais c’est la richesse de sens de ce poème qui m’étrangle.
Le second tercet recèle en lui toute l’équanimité faisant défaut à l’état des lieux qui précède. Une désertion de l’âme nécessaire face à tant de souffrance.
Merci Damy pour ta capacité à faire passer une émotion toute en pudeur et retenue… Quand la plume d’auteur sait se faire discrète pour mieux transmettre une idée.
Même commentaire posté sur Oniris. Il semble que ça marche ?!
Cyrill, pour le commentaire au dessus.
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